Aujourd’hui, j’ai 21 ans.

« La majorité internationale ».

Je ne l’ai pas vue arriver. Trop vite. Sans la moindre envie. À vrai dire, je l’avais presque oubliée. Comme si le temps ne s’écoulait plus vraiment. D’ailleurs, j’ai beaucoup de mal depuis ça, à me souvenir spontanément de mon âge. J’ai l’impression de ne plus vraiment en avoir.

Aujourd’hui, je ne fêterai pas ce temps qui passe. Insaisissable, et invisible. Aujourd’hui sera une journée lambda. J’irai à la bibliothèque, en amphi ; je travaillerai sur mon mini-mémoire, je reprendrai mes cours. Je ne verrai ni amis, ni famille. À vrai dire, je n’aime pas qu’on me souhaite mon anniversaire, et je n’aime pas le fêter, de manière générale. Depuis mon 20ème anniversaire, c’est même pire : la dernière fois que j’ai organisé quoi que ce soit pour l’occasion, je devais avoir 9 ou 10 ans ; et une décennie plus tard, je voulais le fêter à Florence, histoire de marquer le coup. Oui, un très long week-end dans l’une des plus belles villes du monde, et probablement ma préférée. Projet tombé à l’eau, compte tenu de mon sale état. L’état d’après. Du coup, je n’ai rien prévu pour cette année. Dépitée, dégoûtée. Et au vu de l’actualité, j’ai bien fait ; ç’aurait été une déception de plus.

Et puis ? Le bilan de ces 21 ans ?

J’aurais passé 7 ans de ma vie à espérer et à rêver. 7 ans de ma vie à vouloir mourir. 7 ans de ma vie à essayer de me reconstruire. Les 7 prochaines ont intérêt à être radieuses. Parce qu’aujourd’hui, je suis en vie. Parce que même dans mon malheur, j’ai cette chance-là. Parce qu’en 21 ans, j’ai vu l’horreur de loin, la répugnance de bien trop près, l’angoisse de l’intérieur.

Parce qu’une petite étincelle de pulsion de vie s’est allumée dans mes tripes, et je compte bien souffler sur les braises. Propager cette envie, en faire un grand feu de joie. Alors, je remonte le château de cartes, une à une. Et je me donne les moyens d’avancer. Les moyens d’y survivre. Les moyens d’être heureuse. Ce sera ma plus belle victoire contre lui.

Aujourd’hui, j’ai 21 ans, et j’ai un avenir.

 Photo.

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Mise à jour du soir : Eh bien, c’est un échec. Tout à l’heure, lorsque j’ai voulu remplir un formulaire en ligne, j’ai tapé « 19 ans » dans le champ « âge », avant de corriger. Triste réalité : peu importe ce que je peux me répéter pour m’élever, je suis restée bloquée. Là-bas, seule avec lui. Le monde tourne, le temps passe, mais moi, j’aurai toujours 19 ans.

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